La planète N était habitée par la Naissance. C'était la
plus vaste maternité de la galaxie, on y comptait jusqu'à trois millions
de naissances par jour. Les mamans venaient y accoucher dans la joie, on y
avait installé de nombreuses piscines, pour celles qui préféraient
accoucher sous l'eau. Et juste à côté, le petit bassin pour les bébés
nageurs. Quand ils auraient fini de téter leurs mères, et qu'ils
auraient assez de force pour se lancer dans l'élément liquide, qui était
le fondement essentiel de la planète Naissance.
Il y avait aussi un pavillon réservé aux futurs pères. Et une pièce
pour chaque espèce de peurs. Pour les nerveux, des machines automatiques
à ronger les ongles, pour les fervents de lecture, des tourneurs de pages
qui revenaient inlassablement au début de revues dont l'originalité était
de ne comporter ni images, ni texte, c'eût été bien inutile en ces
circonstances ! Et des appareils à fumée non toxique, pour les accros du
tabac. Puis encore des distributeurs de pastilles Valda, qui délivraient
un bonbon toutes les minutes, et même toutes les trente secondes,
moyennant un petit supplément. Il y avait encore : Des tapis roulants de
grande longueur pour les pères atteints d'akathisie aiguë (comprenez :
bougeotte ou plus élégamment « arpentage de couloirs ») et pour
les nouveaux pères, des projections en continu d'accouchement de bébés
phoques sur la banquise. Il y avait aussi de fausses infirmières en
blouse blanche, très affairées, qui renseignaient, entre deux portes,
les malheureux pères sur l'état d'avancement du travail.
La nursery était ravissante, un coin bleu pour les petits garçons, un
rose pour les filles, bicolore pour les jumeaux, camaïeu pour trois bébés
et plus. Ce qui n'était pas rare. En effet, la densité et la
concentration de « tendrine » étaient telles sur la planète N.,
qu'elle favorisait au maximum les naissances multiples. Ce dont tout le
monde se félicitait. Là-haut, on formait une grande famille, et les
parents d'enfants uniques n'hésitaient pas à donner un coup de main et
de biberon aux parents des sextuplés.
Il y avait aussi le Pavillon Françoise Dolto. Là, une fois par jour, on
amenait les nourrissons. Un sosie de la grande psychologue parlait alors
à ces bambins, avec les mots des grands, des mots qu'ils ne comprenaient
pas, mais qui les faisaient beaucoup rire. Elle leur apprenait aussi que
malgré leur jeune âge et leur petite taille, ils étaient des personnes.
Les prématurés n'avaient droit à une consultation que s'ils étaient
accompagnés de leurs parents et pesaient plus de 1500 grammes.
Enfin, une annexe était réservée aux jeunes ménages sans enfants. On
leur donnait des conseils judicieux, des emplois du temps très serrés
avec les périodes fastes à la procréation, on les conditionnait au
maximum pour que leur amour fleurisse et s'épanouisse dans les meilleures
conditions possibles. Par exemple, pendant toute la durée de leur séjour,
on leur interdisait de téléphoner à leurs parents respectifs. On leur
passait la « Symphonie du Nouveau Né » (d'Antonin Goldorak) en
continu, et chaque matin, leur chambre était fleurie d'un joli bouquet de
fleurs bleues. Un dictionnaire des mots doux, ainsi que la Carte du
Tendre, reproduction fidèle de la version originale, étaient
offerts à chaque couple à leur arrivée.
Voilà, en gros résumée, la planète Naissance, la plus belle de toutes,
et qui ne s'éteindra jamais, tant qu'il restera sur terre deux humains
pour donner au monde le rire et l'espérance, la joie et le bonheur
qu'apportent ces petits êtres qu'on dit fragiles, bien à tort, je pense,
car de nous tous, ce sont résolument eux les plus forts.
claude.ammann@wanadoo.fr
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N…Cloclo… La planète naissance, en faisant abstraction
de la place du père qui semble en être une, et de la présence du clown
clone de FrançoiseDolto, la planète naissance aurait sans doute trois étoiles
dans le petit guide Leboyer des bonnes adresses. Naître où ne pas ne pas
naître reste la question. Ph André
Ce n'est plus un satellite, c'est une nébuleuse, une galaxie ! CLOCLO
Pitié, laissez moi le temps de trouver mes
fonds de page... (rires) En fait je me régale en vous lisant. Jetez-en
encore. Apparemment, les bébés ont la cote ( et les mamans sont en
pleine forme, si j'ose dire) Cloddy.
Hum très beau texte/poème Cloclo c'est vrai que les petits
bouchons nous amènent à vivre c'est vrai pour les pères aussi mais
d'une autre manière....Mais Bien à toi Adrien
Cloclo, Je te réponds un peu après la bataille mais j'ai relu ta planète
N et puis ce poème.
Pour ce qui est de la planète N, j'ai bien aimé ces pointes
d'humour dont tu l'as parsemée ( notamment , l'interdiction pour les
jeunes couples d'appeler leurs parents ;-)) mais je reste quand même
moyennement motivée pour y aller . Quand je vois le traitement qui est réservé
aux pères ( condamnés à errer dans les couloirs, pendus aux lèvres des
fausses infirmières ..) , brrrrrr.....à croire que N regroupe tous les
stressés de la galaxie ! ;-)
Non cette planète ne me tente pas vraiment .
Son satellite par contre , est de toute beauté. J'aime cette
inversion des rôles et c'est joliment dit.
Il ne reste plus , pour compléter cette trilogie planétaire
, qu'à écrire aussi joliment sur ce qui pourrait être un autre
satellite complémentaire du premier , celui des pères , non??
Bises Estelle etoile_h78@yahoo.fr
Pour illustrer cet élan d'intérêt pour les bébés (après quelques poèmes
papillonnants dans les délices de la sensualité), j'ai mis une petite
photo dans le carnet "le poète a toujours raison". On y voit un
bébé (ma fille Mila) ouvrir ses yeux dans mes bras au moment de son
premier bain, le 28 septembre 1982 à midi. ¨Ph André
Tu comprends bien que cette planète N était à prendre au 10° degré,
et était uniquement là pour rappeler ( et fustiger au passage) les
attitudes des pères d'antan (je parle de 30 ans et plus en arrière !),
attitude qui n'était absolument pas scandaleuse à cette époque ,
puisque on les reléguait presque automatiquement dans des arrières-salles
et des couloirs où ils n'avaient rien d'autre à faire que de déambuler
(et de clopper . On leur interdisait le plus souvent l'entrée dans
la salle d'accouchement) ! Mais il faut aussi reconnaître aussi que
certains futurs pères (actuellement aussi) n'émettent pas le souhait
d'assister à la naissance, choix qu'il faut respecter également. Merci
pour ton appréciation de mon satellite, j'avoue que je suis très fière
de mon "bébé", et que je le relis toujours avec plaisir.
Grosses bises à toi. Oui pour ton idée de satellite des pères. Tu
pourrais t'y coller ? CLOCLO
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