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(123) Après la défaite
(122) Journal de campagne
Sarkozy, l'Américain de Paris (NY Times)
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"La France est ravie d'être débarrassée de Nicolas Sarkozy. Inefficace aux commandes, il était prompt à commettre des gaffes publiques. Pourtant, il va manquer aux Français, plus qu'ils ne le pensent. Par-delà sa muflerie et ses commentaires à faire grincer des dents, il a transformé la façon qu'avait la France de concevoir la présidence, tout comme il a modifié la vision que les Etats-Unis avaient des Français." estime Baldwin. "Il a occupé le trône tel un mortel, plutôt que comme une créature céleste ou un souverain. Il avait des appétits et des préjugés terre à terre et semblait souvent inconscient de l'impact que cela pouvait avoir. Le soir de son élection [le 6 mai 2007], il a organisé un dîner fastueux [au Fouquet's, sur les Champs-Elysées]. Il a pris des vacances sur le yacht d'un riche partisan. Peu après son divorce, il a épousé un top-modèle après l'avoir emmené en rendez-vous galant à Disneyland." |
"Vous avez du mal à visualiser un président français affublé d'oreilles de Mickey ? Imaginez donc la réaction de la France."
"Peut-être ne regrettent-ils pas Nicolas Sarkozy aujourd'hui ; peut-être n'espéreront-ils jamais son retour. Mais son absence se fera quand même sentir. La température va baisser. Quand ce que nous aimons tant haïr disparaît, c'est l'amour aussi qui s'en va."
Du Fouquet’s aux bas-fonds… De l’« ouverture à gauche » au racolage de l’extrême droite, M. Nicolas Sarkozy a mêlé frénétiquement l’invocation des héros de la Résistance et la mobilisation électorale sur des thèmes xénophobes. Son mode de gouvernement a néanmoins été marqué par une constante : le mélange ostentatoire de la politique et des affaires.
En briguant sa réélection pour faire ce qu’il n’a pas pu faire auparavant et en annonçant qu’il avait changé. M. Nicolas Sarkozy s’épargne le long inventaire des promesses non tenues, des abandons et des reniements. Emploi, dette, pouvoir d’achat, sécurité publique, Etat «irréprochable», libertés : le bilan a des allures de naufrage. Quel que soit le résultat de l’élection du 6 mai, il faut d’ores et déjà prendre la mesure du fiasco : une caricature de gouvernement présidentiel qui, sans en avoir les moyens administratifs, s’est mêlé de tout. Atteint de boulimie législative, il a produit une inflation de lois sans concrétisation ; une politique brouillonne, avec un premier ministre réduit au rôle de «collaborateur» et un Parlement devenu chambre d’enregistrement.
L’extrême concentration du pouvoir ne favorise ni le doute ni la modestie. Cette mise en scène du chef focalise l’attention sur sa personne, en une sorte de psychologie élémentaire qui alimente la machine médiatique et fait oublier les vrais ressorts de la politique. Combien de gros titres sur M. Sarkozy ? Combien de bavardages sur son caractère ? Tout cela enrobé d’adulation ou de détestation. Un piège qui amenait Victor Hugo à grandir paradoxalement Louis Bonaparte, l’auteur du coup d’Etat du 2 décembre 1851, en s’acharnant sur lui, alors que Karl Marx proposait plus lucidement d’interroger «les circonstances et les conditions qui ont permis à un médiocre et grotesque personnage de jouer le rôle de héros».
On ne devient pas chef d’Etat par accident. La politique exige en effet des compétences dont tout le monde n’est pas pourvu : il faut au jeune ambitieux d’indéniables qualités et des dispositions assez rares pour devenir un professionnel capable de se hisser au sommet du pouvoir. A la différence de ses prédécesseurs, passés par des écoles d’élite, M. Sarkozy a effectué des études moyennes à la faculté de droit de Nanterre. Il est titulaire d’un diplôme d’études approfondies (DEA) de science politique et a obtenu un certificat de capacité (...)
Par Alain Garrigou, mai 2012
Retrouvez la version intégrale de cet article dans Le Monde diplomatique de mai 2012, actuellement en kiosques, et dans l’édition électronique. Alain Garrigou Professeur de science politique à l’université de Paris-Ouest-Nanterre. Dernier ouvrage paru : Les Secrets de l’isoloir, Le Bord de l’eau, Lormont, 2012
"Le moment de bravoure de cette année ne sera pas une courte petite phrase, mais une longue anaphore de trois minutes vingt. "Moi, président de la République", seize fois répété par Hollande au cours du débat, en une longue et brillante tirade, exprimant calmement une rupture implacable avec l'esprit du sarkozisme. "Moi président de la République, je ne participerai pas à des collectes de fonds dans un hôtel parisien". Et tout y passa: indépendance de la Justice, statut pénal du chef de l'Etat, indépendance des médias, etc etc... "Moi président de la République": spontanées ou préparées, ces trois minutes vingt constituent le premier véritable moment présidentiel de la saga Hollande." (dans http://www.arretsurimages.net/vite.php?id=13741 )
.... même Pujadas ne peut plus rien pour lui. "Donc, Nicolas Sarkozy, vous avez parlé du vrai travail. Ah non, je n'ai jamais parlé du vrai travail." (Soupir rentré des interrogateurs). Pas de chance: les images existent, vous avez été chopé par la vidéosurveillance. Vous voulez les revoir ? Allons y. Donc, vous avez parlé du vrai travail, puis nié avoir parlé du vrai travail. "Oui, c'est vrai. J'ai eu tort. Je me suis mal exprimé. Je voulais dire autre chose". C'est comme Fukushima (re-soupir. Encore Fukushima !) "Vous avez dit être allé à Fukushima. Vous l'avez répété plusieurs fois. Allez, Marcel, balance la vidéo". Et encore, on va à l'essentiel, on ne vous passe pas le montage complet, on se contente d'une fois. Bon, c'est vrai, je n'y suis pas allé, à Fukushima. Je suis allé au Japon, parler de Fukushima. Et tout ça, ce nouveau salmigondis de menaces et d'aveux, une fois de plus, devant la videosurveillance.
Et l'on parle là, comme on dit, du président de la cinquième puissance mondiale. http://www.arretsurimages.net/vite.php?id=13703
Dans Le Monde... - 20/4/2012
... si la République présume, historiquement, une forme de vérité de la parole publique et donc le fait d’être comptable de ce que l’on dit, on conçoit que la dissociation complète des discours et des actes, des discours et des faits, et même des discours entre eux, ce que l’on peut appeler la banalisation du mensonge d’État, non seulement décrédibilise les hommes et les femmes qui gouvernent, mais sape le sens même du politique, dès lors que le principe de responsabilité républicaine est vidé de sa substance ; plus encore que la défiance à l’égard de tel parti ou de tel politicien, c’est la perte de confiance dans le politique qui est en cause, avec les conséquences qui en découlent en termes de recours au populisme et de refuge dans l’abstention... Dans Télérama
... Une démonstration en images de la véritable nature de l’animal politique Sarkozy. Non pas un grand politique (on le sait maintenant, il aura gouverné par spasmes et – que l’on soit d’accord ou pas avec ses idées – n’aura rien changé au pays) mais un spin doctor de talent. Le bien public lui importe mille fois moins que la façon dont son image sera perçue.
Et comme tous les bons spin doctors, sa préoccupation est de créer les termes du débat public. Si possible autour d’une émotion publique, d’un sujet conflictuel qui lui donne des jambes plus longtemps.
Commentaires repris dans VuPar-paul-moreira |
... Désormais, c’est le défi : faire comme les Allemands. C’est la nouvelle ruse des amis de The Economist qui regrettent que Sarkozy ait arrêté de parler des « réformes à l’allemande » qu’il promettait au début de sa campagne. Alors, pour qu’on n’accuse pas une Italienne de n’avoir qu’un point de vue franco-français – comme on dit toujours à l’encontre de ceux qui n’ont pas le point de vue des Anglo-saxons –, je suggère à nos amis de la presse française de s’intéresser aux réflexions d’un philosophe allemand qui, en vivant en Allemagne, sait bien de quoi il retourne. Jürgen Habermas a son petit avis sur les réformes de M. Schröder et de Mme Merckel.
Dans son prochain livre, à paraître chez Gallimard, intitulé La Constitution de l’Europe, le père du « patriotisme constitutionnel » – qu’on ne peut pas taxer de dangereux gauchiste – revient sur le « calme plat » qui domine l’Allemagne.
Est-ce le signe d’une vie publique sereine ? Pas du tout, selon lui, mais au contraire l’expression d’un nouveau régime de la peur et de l’injustice. « Le gouvernement s’est compromis jusqu’au dérisoire, explique Habermas, en appliquant un programme qui accorde une suprématie sans scrupule aux investisseurs ; qui s’accommode sans sourciller de l’inégalité sociale, de l’émergence de la précarité, de la pauvreté infantile, des bas salaires, etc. ; qui mine les principales fonctions de l’Etat avec sa folie de la privatisation ; qui brade les vestiges délibératifs de la sphère publique politique à des investisseurs financiers en mal de rendement, et fait dépendre la culture et l’éducation des intérêts et des caprices de sponsors qui ne réagissent qu’à la conjoncture. »
Au nom du refus du « déni », faut-il encourager nos candidats à s’adapter au plus vite à cette sympathique politique à l’allemande ? Est-ce aux journalistes de The Economist de nous le dire ? De toute façon, si les Français ne s’adaptent pas, on enverra les roquettes des agences de notation… Michela Marzano
Chômage from Grand President on Vimeo. Légion d'Honneur from Grand President on Vimeo. Brancard from Grand President on Vimeo. D'autres sont sur http://vimeo.com/user10720819 |
29 mars 2012. Neuf ans. Qu’est-ce qui a changé ? Il y a neuf cents ans, nous en étions déjà là :
« Cette
période contient des gouverneurs qui fabriquent contre eux-mêmes une grande
noirceur de tristesse et se roulent dans la boue de l’impureté », écrit
Hildegarde de Bingen. Si clairvoyante Hildegarde. « Leur bouche n’est
qu’un sac à bruits… »
« Combien de temps supporterons-nous et tolérerons-nous ces loups rapaces
qui devraient nous guérir et qui ne le font pas ? Parce qu’ils détiennent
le pouvoir de la parole qui lie et qui délie, ils s’emparent de tout, comme
des bêtes féroces. Leurs crimes s’abattent sur nous […] car ils ne clament
plus ce qui est juste, ils détruisent la loi, comme les loups dévorent les
agneaux. [ …] Leurs ministères nous apportent pauvreté et indigence :
ils se souillent comme ils nous souillent. Jugeons-les donc […] Il faut
agir si nous ne voulons pas périr, car s’ils persévèrent, ils soumettront
et perturberont le pays tout entier. »
« Nous, les princes, nous avons été placés au-dessus d’eux ! »...
Il n’existe qu’une seule façon de gouverner dignement les royaumes que nous sommes : celle de servir cette vie, soit en soi ce qui est plus grand que soi. Notre époque, comme toutes les autres, l’oublie. La sottise élevée au rang d’intelligence, la vulgarité à celui d’élégance, l’absolue idolâtrie de l’argent organisent le saccage du monde. Cet honneur et cette charge que représente la responsabilité de gouverner un pays, les maîtres trompeurs s’y sont dérobés... ( Télérama )
Attention à ce que je peux dire. Pas d’inexactitude. Pas de vulgarité. Pas d’emballement. Mais après tout, que puis-je dire d’autre que ce que, chaque matin, je ressens en suivant, obsessionnellement, de l’étranger où je suis, les nouvelles de cette terrible campagne, où chaque jour le pouvoir en place se prétend le seul propriétaire légitime de l’Etat. Où, paraît-il, si le verdict des urnes ne plaisait pas au clan régnant, c’est que les élections auraient été confisquées, volées. Bref, où la gauche, même la plus raisonnable, pour ne pas dire la plus minimaliste, ne pourrait prétendre à l’alternance que par effraction. Alors, sans fioriture, je vais dire où j’en suis, moi. Je n’attends aucune approbation. Je récolterai probablement le contraire de la part de certains de mes amis.
Voilà : J’ai 73 ans. Je n’ai plus le temps. Plus le temps de perdre. Je ne veux pas faire encore un tour de droite. Pour le dire autrement, je ne veux pas passer mon tour, encore une fois, comme je l’ai fait en 2007, parce que certains, à gauche, au Parti socialiste même, ou tout à côté du Parti socialiste, faisaient la fine bouche. « Je ne me sentais pas », avouent maintenant ou se vantent certains ou certaines. Et bien, moi, voyez-vous, je ne me sens pas d’aller encore une fois me promener dans les bois pour voir si le loup n’y est pas. Il y est, je le sais ! Et puis je ne veux plus avoir honte. Voilà cinq ans que cette « équipe » me fait honte. Chez nous, et ailleurs. Et ailleurs, où je suis en ce moment, on ne se gêne pas pour écrire fort ce qu’à peine on chuchote chez nous. (Là il manque un paragraphe sur les hontes. J’y ai renoncé. Il y en avait trop.)...
... Donc il faut gagner. D’abord gagner. Et pour gagner il faut voter. Il faut voter. Il faut voter. Il faut voter. Vous n’aimez pas le mot « utile » ? Alors je vous propose le mot « nécessaire ». Le vote nécessaire. Ce qui implique, je vous l’accorde, qu’il n’est pas suffisant. Seulement indispensable.
Après il y aura les législatives. Plus ouvertes, plus précises de choix, mais pas suffisantes non plus, les législatives. Aucun vote n’est suffisant. Seulement nécessaire. Indispensable. On meurt encore dans le monde, en ce moment même, pour arracher le droit de vote. Alors ?
Après ? Après, il y a l’action, le travail d’information limpide, la pression populaire. Après il y a nous, les citoyens solidaires, qui devrons ouvrir grandes les portes capitonnées des salons de Bruxelles, ces salons aux lourds rideaux, où nos dirigeants acoquinés, bien à l’abri des regards et donc de la compréhension des peuples et de leur accord, décident de tout sans nous demander rien. Oui, il faudra tout revoir... ...
Paru dans telerama.fr/
Repris dans ArianeMnouchkine.htm
... - Ah ! Oui, lui ! Le bonimenteur qui se fait fort de vous faire acheter chaque année son épluche-légumes multi-usage nettoyeur, trancheur de vérité. Certes, c’est toujours le même carcheur, mais comme il sait enthousiasmer l’acheteur ! Le recordman du bagout. Juste le temps de changer de chemise, et voilà pour le public un multihistrion : selon l’heure Matamore, Rodomont, Polichinelle et Pantalon, dix pour le prix de Toutenun. Celui qui vous fait avaler l’épluchure et le couteau.Vous vous souvenez, comme il utilisait, le pauvre homme, le mot «courage», dans la pièce?
Son courage à lui : taper fort sur les plus faibles. Avec quelle férocité, hein, on intervient dans les affaires de la Grèce. Par contre, en Syrie, on verra plus tard. Et pan ! sur les chômeurs, faut dire qu’ils votent peu, tant pis pour eux. Pauvre courage. Pauvre mot : les mots ont du mal à se défendre. La langue aussi, livrée au hachoir électrique, mordue, mise en bouillie, blessée...
... Il va nous falloir travailler de toutes nos forces pour panser tant de plaies. Et pour nous remettre à penser... Passons.
Il n’y a là qu’un seul être dont les hourras du public n’atténuent pas l’inépuisable solitude. «Aimez-moi ! Encore ! Encore ! Encore !» crie-t-il. Et j’entends «Moi encore Moi encore ! La chose publique, c’est moi !» Le pauvre homme ! C’est qu’il n’est pas donné à tout Ui d’imiter De Gaulle dignement...
( HÉLÈNE CIXOUS repris sur QUI? )
Nicolas Sarkozy a choisi de miser sur le supposé sentiment antieuropéen des électeurs – voilà en tout cas l'idée la plus choquante que l'on retiendra de son intervention. .. Ses menaces de fermer les frontières, en contradiction avec les accords de Schengen, et de revenir au protectionnisme le plus primaire, en violation des règles du marché unique, sont l'expression d'un populisme qui cherche à rivaliser avec les positions extrémistes du Front national, représenté par Marine Le Pen...
Ce comportement est absolument honteux et indigne d'un responsable politique. Et il expose la tactique choisie : semer la terreur pour récolter la docilité bienveillante. Il révèle également quelqu'un qui se croit tout permis, postulat incompatible avec les accusations d'irresponsabilité lancées par le clan Sarkozy contre son rival socialiste, François Hollande, qui a proposé la révision de l'accord budgétaire adopté récemment par l'UE... ( courrierinternational.com/... )
– 23 métaphores paysannes à la noix
– 52 tentatives d’hypnose collective
– 292 promesses : « plus de trucs bien, moins de trucs pas bien »
Une campagne, ce pourrait être une accumulation de listes. Une liste de projets idiots et inenvisageables, de promesses qui n'engagent que ceux qui les croient, une liste de piques misogynes, de compromissions, de tentatives de persuasion par l'exemple (en général fallacieux), une liste d’attaques contre les services publics, une liste de ratages, de noms d’oiseaux et de révélations scabreuses. Une liste de Je me souviens...
Ce qu'il me restera de cette campagne. La diction d'Eva Joly. J'aime sa diction.
J’aime qu'on me dise des choses importantes et qu'on le fasse sur une mélodie délicate, tenace et personnelle. Je déteste les engouements, les mouvements de foule, les gagneurs, les évidences. Je n'aime pas qu'on me parle comme si j'étais une abrutie, comme si je regardais la bande-annonce d'un film à grand spectacle, en appuyant sur les mots qui font frémir et en laissant les suspense là où il le faut. Je n'aime pas qu'on martèle, je n'aime pas qu'on s'indigne artificiellement. Je n’aime pas les Carmina Burana. C'est sans doute la mélodie de la voix norvégienne qui me la rend convaincante. Moi qui suis si profondément latine, j'adhère à cette mélodie norvégienne non spectaculaire. J'adhère à ces démonstrations calmes, dont la cadence si particulière ne tente pas de me capturer par les tripes et les sentiments (qui sont placés dans les tripes la majorité du temps). Ici on ne s’adresse pas à mes liquides corporels ; écouter Eva Joly demande de l’attention et de la mesure. C'est sans doute pour ces raisons que je suis si peu sensible aux effets de manches et aux femmes et aux hommes qui aboient et flattent et embobinent...
( telerama.fr/idees/...veronique-ovalde... )
... Ce qui frappe dans cette campagne électorale c’est son étroitesse de vue et d’esprit, ses programmes riquiqui, rabougris, étriqués, l’absence d’audace et de prise en compte des enjeux qui menacent la planète, non pas dans cinq cents ans, mais demain. Je veux parler, bien sûr, de la crise écologique, à laquelle s’ajoute la crise financière, qui sont l’expression d’une crise plus large, « systémique »..., celle du système capitaliste ultralibéral basé sur une exploitation criminelle des ressources humaines et naturelles. Or, pas besoin d’avoir fait l’Ena pour comprendre que le monde est littéralement au bout du rouleau et que si nous voulons le sauver avant qu’il ne soit trop tard, il nous faut de toute urgence penser et agir de manière radicalement différente, comme le disent d’une même voix Lavagna et Rocard... si le constat est dramatique, rares sont les candidats qui osent appeler à un changement radical de paradigme dans cette campagne électorale au ras des pâquerettes clientélistes. Par « changement de paradigme », j’entends une remise en cause fondamentale des mythes du « progrès » et de la « croissance » qui appartiennent au XXe siècle et qui, de toute évidence, nous mènent droit dans le mur. Pourtant, contrairement à ce que croient les prétendants à la charge suprême, l’opinion publique est mûre pour « entendre des discours plus volontaristes, car l’inquiétude est forte partout »... dans le marasme actuel qui menace durablement la (sur)vie de l’humanité, il est temps que les politiques se remettent à faire de la … politique, – je veux dire de la vraie « politique », celle qui trace les chemins du futur dans le souci du bien collectif... (Marie-Monique Robin)
Une chaine humaine contre l'énergie nucléaire organisée par l'association "sortir du nucléaire" à Valence (26) en 2011. photo : F.Anterion / Le Dauphine Libere / maxppp
Dessin de Plantu dans Le Monde
Après les avoir piétinées consciencieusement cinq ans durant, Nicolas Sarkozy revendique la morale et la décence. Le politique est-elle devenue le royaume de l'amnésie ?... Quel culot, ai-je immédiatement pensé avec un mélange de stupéfaction presque admirative devant ce qu'il se permettait et le regret que la dignité du politique soit ainsi rabaissée! Comment, même devant une salle inconditionnelle, invoquer de si belles exigences, une éthique exemplaire quand durant un quinquennat elles ont été foulées aux pieds!... Ainsi, tout est permis, tout peut être dit, l'amnésie est la meilleure tactique qui soit, la République tellement imparfaite n'interdit pas qu'à nouveau il brandisse l'illusion, pour sa sauvegarde, d'une République irréprochable! En effet, le peuple aspire « à la morale et à la décence » mais c'est le mépriser que de lui promettre ce que consciencieusement, avec persévérance, au mieux on a laissé se déliter, au pire on a détruit. La parole publique ne lave pas tout.... Je bouillais devant ma télévision en imaginant les répliques que l'indécence de l'hommage à la morale et à la décence aurait dû vigoureusement, brutalement susciter. François Hollande et son entourage, François Bayrou et son équipe sont en train de perdre parce qu'ils s'obstinent à se situer dans une campagne classique alors qu'ils ont en face d'eux un "monstre" technique et politique qu'aucun scrupule n'embarrasse. Il fonce et ils donnent l'impression du ralenti. La cinquième vitesse, c'est pour quand ? ( Philippe Bilger - 26 Février 2012 )
"C'est un tweet signé Georges Marchais. Il est bref mais dit tout : 'Comment se passionner pour une campagne où Hollande se prend pour Mitterrand, Sarko pour Giscard et Mélenchon pour l'inimitable Georges Marchais ?' Bien vu M. Marchais ! Jamais une campagne n'avait pris une telle allure vintage. C'est comme si on rejouait le match de 1981... " Lu sur Le 19 heures de Françoise Fressoz
... Est-ce à dire qu’il ne sera pas réélu ? Pas du tout. Contrairement à Zapatero en Espagne et à onze autres dirigeants européens qui n’ont pas survécu à la crise, le président français évolue comme une anguille dans les eaux troubles de la crise. Il sait atténuer la peur de l’inconnu. Roublard, il joue les cartes chères aux partisans de l’extrême droite (identité, sécurité et immigration). Il présente Angela Merkel, figure solide, comme sa représentante, et le prédécesseur de celle-ci, le réformiste Gerhard Shröder, comme son modèle. Il doit batailler avec un électorat désorienté, apeuré, conservateur, de moins en moins cultivé et de plus en plus désireux de voir la France ressembler à l’Allemagne.... (Dessin de Schneider paru dans Tageblatt, Luxembourg)
Miguel Mora El País Sur Courrier International
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Par Gilles Klein le 16/02/2012
"Sarkozy contre Sarkozy" titre l'analyse du Miami Herald (Etats Unis) qui ajoute "Comme tous les héros tragiques et la majorité des présidents fraçais, Nicolas Sarkozy n'a qu'un seul opposant véritablement dangereux dans cette course à la réelection. L'ennemi le plus implacable de Sarkozy dans le vote qui aura lieu dans dix semaines, c'est lui-même. Sarko l'Américain comme il a été surnommé doit faire oublier les premières années où il n'a pas vraiment gouverné la France, enlisé dans les rumeurs people entre son divorce et son remariage. Sa personnalité impulsive et sa fascination pour la célébrité et l'argent ont profondément lassé les électeurs français, beaucoup d'entre eux disent aux sondeurs qu'ils ne voteront plus pour le President Bling-Bling."
... Il a sans aucun doute passé les trente ou quarante premières années de
son existence à rêver de devenir chef de l’Etat mais il est évident que, le
jour même où il est entré à l’Elysée, il a brusquement compris qu’il
s’était trompé, qu’il avait fait fausse route, que ce n’était pas «
son truc ». Depuis, il n’a plus qu’une peur : être réélu, être condamné
à un second mandat et devoir faire pendant cinq ans de plus ce boulot dans
lequel il s’était fourvoyé par erreur.
Il faut reconnaitre que, très vite, il nous a avoué qu’il avait hâte de
faire autre chose, c’est-à-dire de « gagner du fric », de « se la couler
douce », de connaitre ce qu’il appelait lui-même « la dolce vita » au
Fouquet’s ou à bord des yachts de ses copains en écoutant chanter Carla.
Reconnaissons que, depuis 2007, il fait tout, avec application, obstination,
pour ne pas être réélu, multipliant les erreurs, accumulant les échecs et
faisant tout pour se rendre odieux.
Mais, l’échéance fatidique approchant, il est pris d’angoisse. Et si, pour
le punir de ce quinquennat désastreux, les Français, rancuniers, le
condamnaient à rester ?.. - thierry-desjardins.fr
Et fatalement, nous revoyons les cinq années qui viennent de s'écouler. Des années brutales. Tant d'ami(es) ont été prestement remerciés de leurs postes alors qu'ils-elles n'avaient pas démérités... Et puis, toutes ces petites phrases. Ces polémiques qui ne sont pas des débats. Car on n'a plus le temps de débattre. Plus le temps de penser. Une polémique glisse, l'une après l'autre, provoquant une excitation aussi intense que fugitive. Avec pourtant, si on y prête un peu d'attention, des récurrences troublantes et inquiétantes. Ainsi en est-il de tout ce qui touche à l'histoire et qui désintègre notre sens du passé, donc celui de notre avenir. Et pourtant, il n'y a là aucun enjeu économique ou financier... Annette Wieviorka est historienne
On est en train de s'acclimater à l'inacceptable et j'en suis malade. De colère.
Je vis près de la place de la Bastille. Il fait moins huit degrés ce soir, et comme tous les soirs je passe devant des familles Roms qui ont élu domicile dans les cabines téléphoniques de la place. Comment j'accepte ça ?...
depuis des années, dérapages honteux par ci, raccourcis ignobles par là, en veux-tu en voilà, dans notre beau pays. Prenons le dernier en date, il vaut son pesant de merde : « Contrairement à ce que dit l'idéologie relativiste de gauche, toutes les civilisations ne se valent pas... " je crois, qu'il est effectivement raciste et il veut absolument que son patron reste aux affaires, et ce fouteur de merde (au sens propre) est prêt à vendre l'idéal républicain pour que son boss aux mains toujours propres reste sur son fauteuil... Jean-Pierre Sinapi, fils d’immigrés italiens
En PS: Extait d'un discours de Georges Clémancea
Le président de la République parle mais le pays semble ne plus l’écouter. Le public affiche une certaine indifférence à ses projets et son discours. Une forme d’usure qui ne lui laisse comme carte que la surprise... C’est en creux ce qu’il a admis dans ses dernières confidences ("des mesures choc"). Encore faudrait-il que celui qui les annonce parvienne à se faire écouter Philippe Chriqui
Nicolas Sarkozy va-t-il perdre l'élection présidentielle ? Cette issue n'est pas certaine mais probable. Un signe ne trompe pas : Alain Minc le soutient. Or, tous ceux que soutient Alain Minc perdent toujours. C'est une loi... Car Alain Minc, cette faramineuse intelligence, s'est constamment trompé... Jeu de Minc, jeu de vilains ! Certes, mais efficace... JF Kahn repris dans Fichiers
Il a joué au président autant qu'il l'a pu avec, en clou, cette intervention télévisée du dimanche 29 janvier où, à l'entendre, il n'y a qu'une seule politique possible : coller à l'Allemagne. Et tant pis pour l'impopularité de la TVA sociale puisque c'est bon pour la France. Nicolas Sarkozy était droit dans ses bottes, comme Alain Juppé en 1995 lors de la réforme des régimes spéciaux de retraite. Un sacrifié autant qu'un parangon de la pensée unique !.. Il tapera sur les élites, dénoncera la pensée unique, flattera le peuple dans un pays qui tend à devenir de plus en plus populiste. C'est son ultime prise de risque car rien ne dit que les turbulences qu'il va contribuer à déclencher ne lui reviendront pas comme un boomerang. M. Hollande fait le pari que la France aspire à plus de sérénité, M. Sarkozy la croit encore capable de "turbuler".
Dans cette série plutôt bien ficelée, on y en apprend des choses! La plus stupéfiante c'est de voir à quoi tient une campagne électorale : c'est celui qui arrache (avec ses dents mais toujours avec le sourire) les services de la meilleure boite de COM qui gagnera.... Pour paraphraser Guy Bedos je dirais qu'aujourd'hui on ne se préoccupe plus de choses importantes : on ne se demande plus qui est arrivé le premier de l'oeuf ou la poule, on se contente de répérer le trou du cul au moyen de belles images. (kristana)
... le chef de l'Etat paye, aujourd'hui, les travers et les excès de la première moitié de son mandat. Il a, alors, tant parlé, tant discouru, tant promis, tant occupé l'espace matin, midi et soir qu'il a provoqué comme un effet de saturation : quand les Français l'écoutent, désormais, il semble bien qu'ils ne l'entendent plus. Et quand ils l'entendent, ils ne le croient plus.
Enfin, Nicolas Sarkozy paraît victime d'un étrange contretemps : pendant deux ou trois ans, il s'est comporté en éternel candidat, quand les Français attendaient de lui qu'il soit pleinement président. Aujourd'hui, il fait mine de vouloir être président jusqu'au dernier moment, quand il lui faudrait être candidat pour engager la confrontation attendue. On doute que quiconque soit encore dupe de ces jeux de rôle. (Gérard Courtois) LEMONDE | 30.01.12
... Presque toutes les personnes de moins de trente-cinq ans que je connais sont dans la peine et sans espoir, parce qu’il n’ y a devant elles que portes fermées, égoïsmes, et frilosité. Presque toutes les personnes malades que je connais sont confrontées à l’état épouvantable de nos hôpitaux, à des délais sans fin, à de mauvais traitements. Presque tous les enfants que je connais sont exposés à une crise de l’école dont les causes sont limpides : la culture et l'éducation sont chères et ne rapportent rien aux actionnaires.
La culture est trop chère, essayez l’ignorance, disait un slogan. Il est en application...
... Et nous sommes émus, comme je l’ai été en écoutant François Hollande scander le mot égalité... Les mots sont presque tout le temps impuissants. Comme le reste. Presque tout le temps... Parfois, ils prennent leur envol : Yes we can. Entre ici Jean Moulin. Egalité. Les mots des chansons de la Commune, de l’Affiche Rouge. Les mots de Victor Hugo.
Ils deviennent concrets, et vivants, et l’air remplit nos poumons. L’air doux et exaltant des idées. L’air de la campagne. Revient alors le temps des émotions de pensée.
Geneviève Brisac, dans Télérama. Le texte complet.
"Je vais vous faire une confidence... J'aime les gens, alors que d'autres aiment l'argent"... Discours de François Hollande
... Le Monde d'aujourd'hui reproduit de longues citations dans lesquelles Sarkozy, en privé, envisagerait sa défaite, et ce qui s'ensuivrait. " En cas d'échec, j'arrête la politique, oui c'est une certitude. Je suis avocat, j'ai toujours eu un cabinet et je suis passionné de tas de choses, explique aujourd'hui le président à son entourage. En tout cas, je changerai de vie complètement, vous n'entendrez plus parler de moi !..Vous voulez que j'anime des sections UMP ? Je ne mérite pas ça. Je préfère encore le Carmel, au Carmel au moins, il y a de l'espérance !" Cette remarque (parmi d'autres) hautement mobilisatrice pour l'UMP, il ne l'a pas tenue "à un ministre", mais bien devant le journaliste du Monde lui-même, lequel a grillé le "off", en reproduisant les citations, mais à moitié... Voyez comme l'heure est grave: le ci-devant copain des vedettes cite désormais Pascal. Pas Obispo, non. Blaise: "L'homme est ainsi fait que tout est organisé pour qu'il oublie qu'il va mourir"...
... On voit aujourd'hui Bayrou prendre un virage en épingle à cheveux vers la
droite. Il fallait l'entendre, ce matin, devant un Aphatie en extase, expliquer
que les banques n'étaient pour rien, strictement pour rien dans la crise de la
dette, laquelle crise était exclusivement imputable à nos fautes, à nos très
grandes fautes passées de dépensiers inconséquents. Et pas au renflouement
des banques; et pas aux lacunes de l'Europe politique; et pas à la surenchère
désordonnée d'agences de notation schizophrènes et myopes. Non, à nos
fautes. Je serais curieux de savoir comment Bayrou s'imagine l'électeur
sarkoziste bayrouo-compatible. Croit-il que la droite profonde brûle chaque
semaine un cierge aux profits bancaires ?...
Formidable. On est sauvés. C'est un adversaire parfait, la phyyynance, l'odieuse phyyyynance, qui étrangle nos vertueuses banques, nos conseils d'administration entreprenants, nos PME innovantes. Et c'est un thème bien plus lisible que de trancher sur la fusion impôt sur le revenu-CSG, ou sur le quotient familial. Mais ces points délicats, n'en doutons pas, seront tranchés bientôt. Pour l'instant, sus à la phyyynance: nul doute qu'on va entendre bientôt toute la hollandie entonner le refrain. Musique rouge vif, paroles rose pâle: qu'importe, si ça marche !.. Daniel Schneidermann le 23/01/2012 arretsurimages.net/vite.php?id=12947
Le même jour (20/1/2012): "Mauvais calendrier pour Nicolas Sarkozy. Le président de la République comptait défendre le "Made in France" jeudi 19 janvier dans l'usine Seb à Pont-Evêque (Isère) alors que, la veille, journée marquée par le sommet social à l'Elysée, les salariés de la dernière usine du fabricant de lingerie Lejaby dans l'Hexagone avaient appris la fermeture du site d'Yssingeaux (Haute-Loire). Déjà délocalisée à 93 %, la production de l'entreprise sera désormais intégralement sous-traitée en Tunisie." (Voir "assomées social")
En
2007, Sarko était parti à la bataille avec deux triples A, Rachida Dati et Rama Yade, deux brunes
synonymes d'ouverture des fenêtres pour une droite qui sentait le renfermé. Cinq ans plus tard, pour
porter sa bonne parole démonéti
fée, il n'a plus que double 0 et triple 0: Nadine Morano et Valé
rie Rosso-Debord. Hier, il recru
lait des talents dans la diversité ; cette fois, il compose avec l'adversité.
Les deux filles sont de l'Est, ce qui les situe plus retraite de Russie que campagne d'Egypte, plus
fin de règne que début de sacre. Mais les deux sont vaillantes. Quand les hommes se planquent, BI elles osent aller à la mitraille. Quand les ministres restent dans leur niche, elles aboient encore,
et quand la Sarkozye est à l'agonie, elles perfusent toujours. "L 'UMP,
c'est massacre à la tronçonneuse ",
dit Copé, et œ sont elles qui jouent les méchantes...
Le Canard Enchaîné - JM Thénard - 18/1/2012
Il est difficile, dans cette campagne présidentielle à 200 km/h sur fond de cataclysme économique, d’isoler un mot ou un fait de la semaine qui vient de s’écouler. Mais si je devais absolument répondre à cette question pour les 7 derniers jours, mon choix serait somme toute assez simple : la déclaration faite par Jean-François Copé devant le Bureau politique de l’UMP, pour se féliciter de l’efficacité de ses porte-paroles et tirailleurs chargés de harceler l’adversaire socialiste. « Chez nous, c’est massacre à la tronçonneuse »... L’image de Copé est saisissante car elle marque un changement de degré et de nature. La frappe « chirurgicale » du sniper est directe, nette et sans bavure... Cette violence verbale prend un autre sens, et une signification d’une autre ampleur. C’est le réflexe désespéré d’une bête traquée qui, acculée par son bilan, par les sondages et par le contexte international calamiteux, ne peut plus gagner que par défaut de ses adversaires. Toute l’énergie de la campagne pas encore commencée du président-candidat est alors concentrée sur un tir de barrage contre François Hollande, au mépris des règles élémentaires du débat public, de l’honnêteté intellectuelle et du respect le plus élémentaire. Mentir, insulter, parasiter, faire diversion, anything goes. Les occupants du château assiégé jettent du haut des murailles tout ce qui leur tombe sous la main pour briser les assaillants... ( Romain Pigenel ) - 17/1/2012.
Les coups de tronçonneuse sont bruyants, grossiers, et multiplient les dégâts
collatéraux. Surtout, on passe de l’image du tir à celui du massacre,
ce qui n’est pas rien, comme le montrent quelques synonymes glanés dans le
dictionnaire : boucherie, destruction, dévastation, génocide, hécatombe,
pogrom, tuerie. Du film de guerre au film gore. Le tir du sniper a une cible et
un objectif précis ; le massacre vise l’éradication des forces
adverses, pour elle-même et sans autre fin.
.... La politique en général, et les combats électoraux en particulier, ne sont ni des dîners de gala ni des controverses académiques. Souvent, le débat tourne au pugilat. Mais l'on a, cette année, immédiatement touché le fond : pas un jour sans que volent les noms d'oiseaux, sans que pleuvent les attaques ad hominem, sans que les polémiques dégénèrent. La majorité s'en est même fait une spécialité, comme une équipe de football qui se sait en position de faiblesse et décide de "pourrir le jeu", dans l'espoir de faire disjoncter l'adversaire et de le pousser à la faute... Mais de ce jeu de massacre, où l'invective remplace l'argument, où la hargne et le mépris affleurent sans retenue, personne ne peut sortir indemne, aux yeux des Français. Ni les agressés ni les agresseurs, appelés, demain, à gouverner le pays. (Gérard Courtois - Le Monde )
et ne sert manifestement plus à
rien ; si les différents candidats en affinent la suite et programment
minutieusement le timing de leurs futures déclarations, celles-ci sont
maintenant parfaitement inutiles, car elles se résument désormais à de la
communication, et à l’espoir que leurs concurrents disent une phrase
maladroite dont ils feront alors leurs choux gras : il s’agit là d’un
petit jeu qui n’intéresse personne d’autre qu’eux-mêmes, mais, comme ils
y sont plongés jusqu’au cou 24 heures sur 24, ils ne peuvent pas s’en
rendre compte.
En réalité, ils ont dit tout ce qu’ils avaient réellement à dire, et la
suite n’aura d’incidence que sur le chiffre d’affaires des instituts de
sondage : il serait préférable de procéder à l’élection dès
maintenant... ( Elie
Arié ) - 13/1/2012.
Le président n’est pas candidat. On ne peut pas dire qu’il ne l’est pas encore, on ne peut pas affirmer en toute certitude qu’il le sera. Ce vague est diabolique. Il permet de mettre en valeur l’activité du président comme autant de gages donnés pour l’avenir. C’est un (presque) candidat qui soutient la création d’une coopérative ouvrière pour la reprise de Seafrance. C’est un (presque) candidat qui, envers et contre tout, affirme vouloir mettre en œuvre une nouvelle taxe qui aurait beaucoup à voir avec celle prônée par James Tobin... Cette campagne, qui n’en est pas une puisqu’il n’y a pas de candidat pour la mener, se développe dans une certaine confusion. Voulue, délibérée, car à être trop clair on risque de se faire comprendre, ce qui n’est pas exactement le but recherché... Mais le passage de la présidence immaculée à la candidature qui a les pieds dans la boue mettra en évidence que Nicolas Sarkozy est peut-être le plus roué de tous mais que son secret était celui de Polichinelle. (Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot.)
... Après une semaine et demie de tir nourri sur le candidat socialiste, le président sortant, pas encore candidat déclaré, a atteint les deux buts qu'il s'était fixés : faire oublier son bilan par un feu de propositions - TVA sociale, taxe Tobin - qui ont pour caractéristique de transcender le clivage droite-gauche ; montrer la faiblesse programmatique de l'adversaire en pilonnant systématiquement ses positions... La tactique présidentielle est conforme à celle qu'il avait utilisée en 2007. C'est une guerre de mouvement qui consiste à étourdir l'adversaire par toutes sortes d'attaques et simultanément à garder l'avantage en créant sans cesse le débat... Françoise Fressoz
Mariette Darrigrand: "Saurez-vous relier chacun des candidats à son «Monsieur-Madame »?"
... Bon alors, cette campagne, il paraît qu’elle a commencé, même pour ceux qui n’ont pas vraiment commencé, même pour ceux qui vont en sortir bientôt. On voit un type faire des simagrées autour de Jeanne d’Arc, un autre type faire des simagrées autour de Mitterrand, un tas de types faire des simagrées dans les usines qui ferment. Ça ressemble à une suite de danses nuptiales désarticulées. Elles s’accompagnent d’un brouillard verbal récemment désigné comme « éléments de langage », sous-produit des argumentaires élaborés par des professionnels de la manipulation (yaourts, fringues, assurances, bagnoles, centrales nucléaires, médicaments, présidents de la République). Des sondages incessants infligent le rythme, des flèches qui montent et qui descendent, machin a pris des points, truc en a perdu, tu parles d’un suspens. On peut suivre comme on suit le sport à la télé. Qui entre en Ligue Un, qui en sort... telerama.fr/idees/presidentielle-j-100-...
Enfin, un débat. Un vrai. Les matins se suivent, et ne se ressemblent pas. Le débat sur la suppression du quotient familial, ... s'est imposé comme co-feuilleton du jour .... Et quel débat ! Comme au bon vieux temps, celui d'avant 1981, quand la droite promettait, en cas de victoire de Mitterrand allié aux communistes, les chars russes place de la Concorde. Cette fois, c'est la famille, qui est victime des ogres rouges. Pardon, la Famille (majuscule). Mieux: la Fhhâââmille. Aveugles que nous étions. Nous n'avions pas assez vu, en Hollande, un pernicieux adversaire de la Fhhâââmille. Nous n'avions pas vu, caché dans le dos de Sapin, le grand couteau du boucher assassin des trois petits enfants qui s'en allaient glâner aux champs. Et les canines du vampire Moscovici. Et la rhétorique vicieuse du pervers Cahuzac.
Heureusement, la droite était là, pour dénoncer, la "folie", les "conséquences dramatiques", le "coup de massue", etc d'une suppression du quotient familial. Pensez donc: une réforme à laquelle gagneraient les ménages dont le revenu est inférieur à trois fois le SMIC, et à laquelle perdraient (un peu ou beaucoup) les autres, quelle "folie", en effet ! On est heureux que la droite l'ait, jusqu'à maintenant, épargnée à la France. Sois sage et dors bien, sinon le Grand Méchant Hollande viendra te chercher... ( Par Daniel Schneidermann le 11/01/2012 )
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"Ne nous y trompons pas : si nous ratons ce rendez-vous de la responsabilité et du courage, les conséquences économiques et sociales pourraient être comparables à celles provoquées par une guerre" |
Bien. Arrivés à ce point de la première semaine de l'année, si l'on s'arrêtait deux minutes, pour faire fonctionner ce qui nous reste de cerveaux ? Quel est le point commun entre la proposition de Sarkozy aux salariés de SeaFrance, son initiative sur la TVA sociale, et "l'affaire sale mec" ? ... ...
Dans cette opération désespérée, ils ne peuvent clairement plus compter sur la complicité consciente de l'élite de l'éditocratie française... Mais ils peuvent toujours compter sur l'imbécillité aveugle du système de l'information continue qui, plusieurs heures après ces rectifications, continuait à matraquer de "l'affaire sale mec", à grands coups de bandeaux et de mazerolades moralisantes. De la twittosphère à l'univers de l'info continue industrielle, que relie un fil direct, ce système se prête parfaitement aux opérations orchestrées de saturation par les sales mecs de la Sarkozie, comme nous le montrions hier. Ce n'est sans doute pas très grave pour Hollande, à qui on ne parviendra pas à refaire le coup du "veilli, usé, fatigué", qui contribua à démolir Jospin en 2002. Ce l'est beaucoup plus pour le débat lui-même. Dans un système idéal, le feuilleton de mercredi aurait dû porter sur le brutal renchérissement du coût de l'énergie nucléaire, après le rapport de l'ASN exigeant des milliards d'investissements de sécurité dans les centrales françaises. Reste-t-elle compétitive ? Cela ne plaide-t-il pas pour la relance des énergies de substitution ? On n'en parlera pas. Ou à la Saint Glin Glin.
09h15 le neuf-quinze Par Daniel Schneidermann le 05/01/2012
Le Canard Enchaînné 28 12 2011
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